Ou quand le temps qui passe devient le temps qu'il reste.
Pour fuir le sommeil, s'enfermer dans le placard, derrière le rideau noir. Là ou la seule lumière est un pâle halo jaune, là ou tout est fragile et silencieux. Là ou les gestes comptent, précis. Comme seul compagnon de mes nuits, comme seul amant, j'ai ces morceaux de pelicules luisants. Le revelateur, qui coule dans mes veines, et mes yeux fatigués qui cherchent le contraste. Tracer du bout du doigt les silhouettes voilées, passer de l'ombre à la lumière, et oublier le temps. Laisser passer une heure, puis deux, puis cinq. Sortir de là au petit matin, les doigts impregnés de cette odeur étrange.
Prendre l'option inactif, direction assistée. Passer un rapide moment en leur compagnie, un moment parsemé d'étoiles mortes et de soupirs, parce que rien ne va, que tout le monde le sait, et que la seule chose à faire c'est de ne pas en parler. Il me parle de l'appartement, qui sera sans doute minuscule, mais qu'on amenegera de façon tellement insensé qu'on y sera bien. On se dit vaguement qu'on a plus qu'à se maquer, tous les deux, que notre amour à nous il serait beau et amusant. Mais comme je suis pas assez poilu et que j'ai pas grand chose entre les jambes, on oublie l'idée. On s'allume une clope en se lamantant sur nos sorts et en pestant contre la vie qu'est mal foutue, on ronchonne, et on regarde la pluie. Qui tombe.
Je trempe un gateau dans une tasse de lait chaud. Cette peste de Baguera se tape l'incruste et vient foutre ses sales poils dans mon lait. Encore cinq secondes avant qu'elle me griffe. J'apprécie son côté salope et intouchable. Je l'envie, même. Allons bon, ce n'est qu'un chat, mh? Ouais. J'essaye de faire tenir ma cuillère sur mon nez. Activité maximale. J'allume une clope. Faire passer le temps.
Reparer les fissures. Apprivoiser le chagrin. Les paupières tombantes, les cernes naissantes. Ne jamais s'endormir, ne jamais se reveiller. Etre à mi-chemin, entre-deux. Attendre.