La couleur de mes pompes.
La couleur de mes ongles, la couleur de mes cheveux, de ma vie peut-être, bon. Orange. Ca ne veut rien dire mais j'arrive ainsi à cerner cette courte période de ma vie qu'est le présent, la période orange, et elle va durer. Le présent va durer. Même si tout semble un peu de travers, même si des fois ça fait chier sans qu'on sache pourquoi. Je me fais vieux loup de mer solitaire dans ma cabine en bois ma chambre sous les toits. Il y a le monde d'un côté, la balançoire de l'autre, j'y passe des nuits à rêvasser, des journer à écrire ou à gribouiller. L'encens s'y consumme sans arret les clopes s'y fument à longueur de journée. On y boit toujours du thé. Peu importe l'endroit. Keeps sourit doucement dans la pièce d'à côté, on glande sous la couette on fume on parle, on pose des questions sur l'origine du monde et sur ces trucs qui se passent sans qu'on sache vraiment. Puis on est bien, là, sous le soleil qui traverse le toit qui éclaire la fumée qui s'évade de nos doigts. Comme avant, il y a longtemps, exactement comme avant. Alors tout est possible. Moi je décide de tuer mes remords je regarde les gens je me dis que tout le monde se permet tout, pourquoi pas moi. Je décide de m'en foutre, de me laisser pousser les envies et de ne plus, me torturer. J'assimile des données, des gens qui viennent, qui partent, des sourires qui flottent joliement comme des bulles et qui parfois, éclatent. Rien n'est grave, et tout va bien. Et j'apprécie de vous revoir et c'est simplement ça et tant pis si des fois, je gère pas. Je ne suis peut-être pas, ce qu'on attend de moi, mais. Lève toi et marche, je ne suis pas. C'est simplement bien, de se croiser comme ça, faut pas chercher plus loin, pas se rentrer dans la tête avec les doigts. Les choses changent bien et puis quoi? Regarde nous, on vaut mieux que ça. Allez fais un sourire pour voir? Voilà. On est bien, là. Le Fou fait comme une voix Off dans ma tête, bientôt tu te materialises bientôt t'arrète de pencher comme la tour de pise, bientôt tes yeux bientot tes bras, et je me coulerais dans le mouvement du moment, à savoir être deux et être contents, quoi, t'es pas content? D'accord j'arrète, Keeps se foutra bien de moi quand j'aurais ta silhouette entre les doigts et que je pourrais plus m'en décoller parce que putain, tu seras Là. C'est dimanche. On s'est reveillé avec Keeps, mes pieds à sa tête et ma tête à ses pieds, le gros chat sur la couette enroulée, un rayon de soleil un paquet de clopes qui trainent. On se sourit ensommeillé, la vie, la vraie. On mange des biscuits et on boit du lait, on se souvient on rie, on a rien à faire on est pas pressé. Et le temps nous sépare encore qu'est-ce que ça peut bien faire, on se retrouvera toujours là comme ça et ça au moins, ça ne changera pas. Tiens, une certitude, c'est la saison. Ca fait du bien. J'ai des tas de trains à prendre encore, et parait que le Magicien vire de bord, parait qu'il va débarquer là bientôt peut-être que j'y verrais clair, il me racontera des histoires de bateau et je le croierais aveuglement comme je l'ai toujours fais, à tort ou à raison, on s'en fout, au fond. Peut-être que j'aurais des réponses et puis des questions. Regarde il fait beau, on écoute du skin-head reggae on savait même pas que ça existait, bon, on rigole. On est bien hein putain? On est là on fout rien. On est bien, hein, putain. Et puis on laisse le temps couler à quoi bon le voir dérailler, on pourrait peut-être, je sais pas moi, respirer. J'ai plein d'histoires à vous raconter, faudrait que je vous parle de la petite pute des Beaux Arts et de ma petite haine, et de combien j'ai envie de lui écraser ma clope entre les deux yeux, puisqu'elle a du yop vanille dans la crâne et que vraiment, pute. Faudrait que je vous parle de l'Afrique qui m'appelle et que je vais bientôt frôler, avec Raël à mes côtés, pour de vrai. Faudrait que je vous parle du monde qu'est immense et de ce piège étrange qu'est le cycle scolaire la maison les vacances, faudrait que je vous dise un jour, bien haut bien fort, que de toutes façons la vie aura tort, que j'veux pas me faire baiser comme ça, que moi je vais partir que de ma vie je ne veux faire que ça. Faudra que j'vous raconte, comment on se sent quand on dit Je t'aime et qu'on y croit de tout son coeur et que ça fait même pas peur, et qu'à côté de ça, on fonce droit dans le mur theière entre les bras. Ouais faudra vous raconter ça. Un jour. Mais là, café, clope, et révalités.